EVOLUTION DU GENRE ROMANESQUE

Synthèse sur le genre romanesque

1. Les sources du genre romanesque

Pour les lecteurs du XXIe siècle, le terme « roman » désigne un genre que l'on oppose aisement aux autres genres: théatre et, en particulier, à la poésie . les mots « roman » et « prose » sont ainsi aujourd'hui inséparables. Or, cela n'a pas été toujours le cas. Le terme « roman » est apparu pour la première fois au XII éme siècle (Moyen Âge) pour désigner des récits le plus souvent écrits en vers mais en langue romane (le français courant de l'époque) ce qui a permis de les désigner comme "roman".

C'est cette forme du « roman » que les troubadours et trouvères utilisent pendant tout le Moyen Âge, afin de faire le récit d'exploits des chevaliers . Il ne faut pas oublier qu'à cette époque, le récit écrit n'est qu'un support pour la mémoire, puisque la littérature est profondément orale : ses destinataires sont des auditeurs et non pas, comme aujourd'hui, des lecteurs. Cette littérature s'adresse d'ailleurs à un public restreint, souvent celui des seigneurs et de leur cour.

 L'un des auteurs les plus célèbres de cette période, Chrétien de Troyes, a ainsi su, à travers ses romans (Le Conte du Graal, Le Chevalier à la charrette, Yvain ou Le Chevalier au lion, etc.) développer ce type de récits. Au XVIe siècle, grâce à la diffusion de l'imprimerie (Gutenberg a imprimé un premier ouvrage, la Bible, en 1455), le roman bénéficie d'un public plus large, et qui se fait lecteur plus qu'auditeur.

En France, François Rabelais inaugure le genre romanesque moderne sous la forme d’apologues humanistes (ex. Gargantua, Pantagruel…)

2. XVIIe siècle : Le roman précieux et d’analyse

Avec la Renaissance, Apparaît alors un nouveau type de romans qui connaîtra un certain succès : le roman pastoral avec Honoré d'Urfé, dans L'Astrée (1633), qui met en scène des personnages idéalisées, des sentiments raffinés centrés sur l'amour et l'harmonie dans un cadre pastoral antique. Cependant, ce type de romans, malgré son succès, se trouve discrédité. En effet, les personnages semblent d'une perfection peu crédible, l'atmosphère est ressentie comme trop idyllique, et certains auteurs et lecteurs (en particulier les lecteurs qui n'appartiennent pas à la noblesse) s'en éloignent.

 

Une autre direction se dessine alors, représentée par La Princesse de Clèves, de Mme de La Fayette, chef d'œuvre du classicisme et du « roman d'analyse ». Ce roman présente plusieurs spécificités qui le rendent remarquable :

Le récit s'ancre, non plus dans une Antiquité lointaine ou une histoire de légende, mais dans l'histoire réelle. Les personnages sont inspirés de personnalités réelles de la Cour (Henri II)  d'alors, et l'auteur mêle donc réalité historique et fiction (ce qui offre aux lecteurs le plaisir du « décryptage »).

 

La langue employée dans ce roman est extrêmement classique pour mieux révéler les troubles et les secousses engendrés par la passion amoureuse. La psychologie des personnages est donc un élément essentiel de ce roman comme des romans d'analyse qui lui succèderont.

 

3. XVIIIe siècle : roman épistolaire

Dans la seconde moitié du XVIIe siècle et tout au long du XVIIIe siècle, le roman par lettres se développe et connaît un grand succès. Ces ouvrages se présentent sous la forme de lettres croisées, envoyées et reçues par les différents personnages. On retiendra (entre autres !) La Nouvelle Héloïse, de Rousseau (correspondance amoureuse entre deux amants) et Les Liaisons dangereuses, de Choderlos de Laclos (les aventures libertines de deux héros scandaleux).

4. XIXe siècle : le triomphe du roman

À la suite des Lumières, mais aussi avec le développement industriel et l'essor de la bourgeoisie, le roman connaît au XIXe siècle un grand succès, et s'oriente majoritairement vers une représentation fidèle de la réalité sociale– sans se limiter à la classe dirigeante.

 Le mouvement littéraire du réalisme s'attache ainsi à décrire scrupuleusement les faits et gestes de personnages issus du « peuple » ou du « grand monde ».

 

Balzac révèle cette ambition totalisante à travers le titre qu'il choisit pour rassembler ses ouvrages : La Comédie humaine. Ce titre ne signifie en aucune manière une intention comique, il signifie la volonté de saisir les masques et les diverses conditions ou états des hommes.

 

Flaubert (L'Éducation sentimentale), Maupassant (Une Vie, Pierre et Jean) cherchent également à montrer aux lecteurs les parcours de personnages parfois très humbles, en privilégiant une narration objective.

 

Parallèlement, le lectorat féminin apprécie toujours les ouvrages relatant des histoires d'amour « romanesques » – ce que Flaubert met précisément en scène dans Madame Bovary, roman dans lequel le personnage éponyme se nourrit de rêves sans jamais pouvoir se satisfaire de la réalité.

 

Un peu plus tard, le naturalisme poursuit cette ambition, avec un aspect scientifique plus marqué. Pour Zola, le roman doit être une sorte de « laboratoire » grâce auquel on peut étudier les comportements humains, et les révéler (voire les dénoncer). S'appuyant sur des notes précises, des romans comme Nana, Germinal, La Bête humaine, etc. évoquent un pan de la société et des conflits ou problèmes réels, à travers la fiction.

Dans le deuxième partie du XIXe siècle d’autres genres romanesques apparaissent : le roman historique (Alexandre Dumas Les trois Mousquetaires) ; le roman fantastique et d’anticipation (Jules Vernes Voyage au Centre de la Terre…), le roman policier (Maurice Leblanc Arsène Lupin ou Rouletabille Le Mystère de la chambre jaune).

 

5. Vers le contemporain

Aux XXe et aux XXIe siècles, le roman est toujours un genre particulièrement prisé par les auteurs comme par le public, mais la variété qui l'a toujours caractérisé s'accroît encore :

Certains romanciers creusent la veine du XIXe siècle et s'attachent à la description du réel – tout en apportant des innovations de style ou de construction comme Louis Aragon, Jean Giono, Colette…

D’autres, marqués par la violence de la première moitié du XXe siècle, prennent position par rapport à l'insupportable (la guerre, le nazisme, toutes les formes de totalitarisme) dans des romans engagés : ainsi Céline, avec Voyage au bout de la nuit, Malraux, dans L'Espoir, Camus avec La Peste, etc.

Le roman d'analyse est toujours présent avec notamment Marcel Proust ainsi que le roman historique, ou le roman d'aventures; le roman policier connaît un essor important, ainsi que le récit de science-fiction ;

Dans les années 1950, le « nouveau roman » refuse la psychologie et toute subjectivité ; les auteurs de ce courant (Michel Butor, Alain Robbe-Grillet, Marguerite Duras, Nathalie Sarraute) ne livrent que l'extérieur des choses et des êtres, laissant au lecteur le soin de « construire » un personnage et un univers.

Enfin, les frontières entre fiction et réalité se brouillent, avec des genres comme l'autofiction, mêlant autobiographie et fiction.

Date de dernière mise à jour : 27/06/2017

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