L'EVOLUTION DU PERSONNAGE DE ROMAN

L’évolution du personnage

Le personnage de roman constitue le point d'ancrage des récits romanesques qui souvent se structurent ou se construisent autour d'un personnage principal. Ce personnage donne même parfois à l'oeuvre romanesque son titre: ex.La Princesse de Clèves (Madame de La Fayette), Mme Bovary (Gustave Flaubert), Eugénie Grandet (H.de Balzac), Manon Lescaut (L'abbé Prévost), Sido (Colette), Thérèse Desqueyroux (François Mauriac).....

Le personnage de roman est devenu en quelque sorte à partir notamment du XIX ème siècle, la clef de voute du récit romanesque et du roman moderne . Il traduit la façon dont un auteur choisit de peindre l'être humain, de montrer à travers, notamment, la façon dont il le perçoit ou le ressent, son époque. Le personnage de roman est à ce titre le moyen essentiel pour les romans réalistes ou naturalistes de peindre une société dans laquelle les lecteurs pourront se reconnaitre. Le personnage de roman permet de mettre également en avant, leurs penseés le plus personnelles et intimes  nous aidant  ainsi comme l'écrit François Mauriac à nous mieux connaître et à prendre conscience de nous-mêmes». En dépit de quelques tentatives littéraires pour le faire disparaitre ou en tout cas réduire son importance (Nouveau Roman) il reste aujourd'hui encore le fondement de l'expression romanesque.

Le personnage de roman trouve sa source lointaine dans les premiers récits de l Antiquité  ou « épopées »  qui mettent en scène dieux ou demi-dieux, rois ou hommes dotés de qualités exceptionnelles, tel Ulysse dans L’Iliade et L’Odyssée d’Homère. Ces récits mythologiques ou légendaires mettent en avant des héros exemplaires, afin de nourrir  les rêves et les idéaux des lecteurs, de transmettre  des valeurs morales et sociales, en créant des aventures extraordinaires captivant le lecteur. De même au Moyen Âge, les romans mettent en scène chevaliers et héros courtois (comme Lancelot de Chrétiens de Troyes). Les personnages évoluent dans un monde peu réaliste, mais ces récits posent les bases du personnage du roman moderne.

 Au XVIème, on retrouve des personnages hors du communs avec des personnages  comme les géants Pantagruel ou Gargantua (Rabelais) qui portent un regard satirique et un message philosophique (humaniste) sur l’homme et la société.

Au XVIIème siècle, inspirés par le roman de chevalerie, les personnages sont des chevaliers comme Don Quichotte. L’idéal de personnage est l’honnête homme. Les héros ou personnages deviennent plus crédibles et s’intéressent aux émotions qu’ils éprouvent comme  La Princesse de Clèves , ce qui traduit la sensibilité de cette époque ainsi que la manière dont la société a choisi de regarder et de peindre l’être humain. (Voir roman d’analyse)

Au XVIIIème siècle, le personnage de roman n’est plus le représentant d’un type littéraire mais un être au caractère propre et au destin unique. La narration à la première personne traduit la subjectivité des personnages (Jacques le fataliste de Diderot) et la forme épistolaire (Les Liaisons dangereuses de Laclos) suggère l’autonomie des personnages.

Au XIXème siècle, les romanciers cherchent à rendre compte de ce monde qui leur échappe. Leurs univers incluent toutes les classes sociales (La Comédie Humaine de Balzac, Les Rougon-Macquart de Zola). C’est le siècle du réalisme, où on représente les personnages dans les moments les plus quotidiens de la réalité à laquelle ils sont confrontés.

Au XXème siècle, le personnage se déconstruit progressivement.  Les Dimanches de Jean Dézert (1914) de Jean de la Ville de Mirmont annonce ce mouvement qui trouvera son apogée avec le Nouveau Roman. L'auteur donne plus sa vision et laisse moins d'autonomie et de personnalité à des personnage qui ne retrouvent plus les caractères des héros ou des personnages des  siècles passés. On ne donne plus forcément ses sentiments (L’Etranger de Camus), voire son identité. Le lecteur peut encore tout de même s’identifier à eux, mais c’est une tâche plus complexe.

Avec le nouveau roman, les nouveaux romanciers (Robbe-Grillet, Nathalie Sarraute, Claude Simon, Milan Kundera) désacralisent le personnage romanesque et la théorie réaliste du roman en condamnant la cohérence psychologique : intrigue difficile à saisir, des personnages flous, sans nom ni prénom, sans visage  (« Il », « Elle », ou identité réduite à une lettre : « A »…) Pour, Robbe- Grillet, « le personnage (du roman réaliste) appartient bel et bien au passé ».

Toutefois l'impact du Nouveau Roman reste limité et ces romanciers ne trouvent pas un large public. L'echec du Nouveau Roman à trouver un public popualire montre à quel point le personnage de roman reste l'élément central du récit romanesque.

Date de dernière mise à jour : 20/06/2017

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